Numéro
2 - Modernité et interprétations religieuses
Corresponding Author(s) : Samir Amin
Afrique et développement,
Vol. 29 No 1 (2004): Afrique et développement: Numéro Special sur 'Philosophy and Development'
Résumé
La naissance de la modernité en Occident est caractérisée par trois critères principaux: le capitalisme, la démocratie, et la laïcité. Mais pour comprendre ce phénomène, il faut se rendre compte des rôles joués par les trois religions dites du Livre—le christianisme, le judaïsme, et l'islam. L'Europe a pu avancer vers la modernité en s'appropriant le passé classique de la Grèce antique. Ce fut l'invention de la Renaissance. Cette stratégie a permit à l'Europe de la Renaissance de fonder la modernité sur la laïcisation de la vie sociale et de déclarer que les êtres humains font leur propre histoire et que pour ce faire ils ont le droit d'innover et de dépasser les traditions. La modernité annoncée par la Renaissance instaure une rupture définitive avec le principe fondamental des sociétés pré-modernes y compris celle de l'Europe chrétienne et féodale. La Renaissance arabe du XIXe siècle par contre n'est jamais allé au delà des paramètres définis par la religion musulmane, ce qui aurait été nécessaire pour lui permettre de rompre avec les traditions et de s'ouvrir aux concepts modernes de liberté et de démocratie. L'islam politique contemporain n'a pas été une création authentique des peuples musulmans, mais a été inventé par les orientalistes au service du pouvoir britannique aux Indes. Récusant le concept de la modernité émancipatoire, l'Islam politique refuse le principe même de la démocratie et des droits individuels et collectifs. Cela constitue un défi pour le développement en Afrique et au Moyen-Orient.
Samir Amin, Directeur, Forum du Tiers Monde, Dakar
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